Les fibrosarcomes chez le chat

Les fibrosarcomes  chez le chat

Présentation des fibrosarcomes

Qu’est-ce que c’est ?
Quels animaux sont concernés ?

L’âge
Les prédispositions raciales et de sexe
L’influence de la vaccination
L’influence des injections non vaccinales

Quels en sont les symptômes ?

Le diagnostic des fibrosarcomes cutanés

Suspecter un fibrosarcome
Confirmer le diagnostic d’un fibrosarcome
Déterminer le stade clinique du fibrosarcome
Le pronostic des fibrosarcomes

Le traitement

La chirurgie 
La radiothérapie 
La chimiothérapie 
Les autres thérapies

 

Présentation des fibrosarcomes

 

Qu’est-ce que c’est ?

 

Les fibrosarcomes appartiennent au grand groupe des tumeurs appelées les sarcomes des tissus mous. Le suffixe –sarcome désigne le caractère malin de la tumeur à l’inverse du  –ome  désignant une tumeur bénigne. Ici nous parlons donc d’une tumeur maligne qui se développe à partir des fibroblastes.

D’après une étude réalisée en 2016, sur les données du registre suisse des cancers félins, les fibrosarcomes représenteraient 37 % des tumeurs localisées sur ou en dessous de la peau, d’autres auteurs reportent cependant une incidence bien plus basse : les sarcomes des tissus mous représenteraient 7 % de l’ensemble des tumeurs cutanées et sous cutanées chez le chat.

Les fibrosarcomes sont des tumeurs superficielles qui se développent le plus souvent sous la peau, cependant ils peuvent par exemple se développer au niveau de la cavité orale. Il existe deux groupes de fibrosarcomes : ceux consécutifs à une injection et ceux dit spontanés. La démarche diagnostique et thérapeutique sera similaire pour les deux groupes.

Cette tumeur possède la particularité d’être agressive localement et récidive fréquemment. En revanche, on ne note l’apparition de métastases que tardivement dans l’évolution de ce cancer (entre 265 et 309 jours après le diagnostic) et ces métastases sont moins fréquentes que pour d’autres tumeurs malignes (dans 0 à 26 % des cas selon les études).

Quels animaux sont concernés ?

Tous les animaux peuvent être concernés. Voici quelques données épidémiologiques et quelques facteurs favorisants :

 

L’âge

D’après une étude publiée en 1996, la moyenne d’âge des chats présentant des fibrosarcomes aux sites d’injection est estimée à 8 ans et à 10 ans pour les chats présentant des fibrosarcomes en dehors de la zone vaccinale. Toutefois de nombreux ouvrages ne renseignent pas cette donnée épidémiologique, il n’y donc pas vraiment d’âge « à risque » défini.

 

Prédisposition raciale et de sexe

Aucune prédisposition de race, de sexe (mâle/femelle) ou du statut hormonal (stérilisée/ non stérilisée) n’a été mise en évidence à ce jour.

 

L’influence de la vaccination

On incrimine souvent la vaccination lors de l’apparition de fibrosarcomes. Cependant, avant de discréditer la vaccination il ne faut pas oublier les nombreux bénéfices qu’elle apporte (notamment la prévention de maladies infectieuses graves voire mortelles). Un groupe de vétérinaires cancérologues, nommé « Vaccine- Associated Fibrosarcoma Task Force », a été créé pour étudier les fibrosarcomes liés à la vaccination.

La description des injections vaccinales en tant que facteur favorisant l’apparition de fibrosarcome a été réalisée en 1993. Les vaccins contre la leucose féline et la rage sont les plus incriminés. Par ailleurs, plus le nombre d’injections réalisées au même endroit est élevé plus le risque de développer un fibrosarcome à ce niveau est important. Il faut donc éviter de répéter les injections au même endroit.

Le fibrosarcome au site d’injection peut apparaitre 1 mois à 10 ans après une vaccination. L’absence de vaccination récente n’est donc pas un critère d’exclusion de l’apparition de fibrosarcome au site d’injection.

L’apparition de ces fibrosarcomes serait favorisée par une inflammation chronique engendrée par la réaction vaccinale. Cette inflammation entrainerait une modification de l’expression de certains proto- et anti-oncogènes (C-jun, p 53, TGF alpha,…) qui régulent le cycle cellulaire (voir bases de biologie et de cancérologie). Par ailleurs les vaccins adjuvés renforcent cette inflammation et on suppose donc que la présence d’agents adjuvants favoriserait l’apparition de fibrosarcomes amis ce fait est controversé et cette hypothèse n’est pas prouvée.

Face à ces considérations, des recommandations vaccinales visant à limiter l’apparition de fibrosarcome ont vu le jour et des principes de vaccination ont été mis au point par des organismes comme le WSAVA.

 

L’influence des injections non vaccinales

Il est également décrit que certaines injections non vaccinales seraient susceptibles de favoriser le développement de fibrosarcomes. De même, on suspecte que la mise en place de puces électroniques pourrait entrainer le développement de fibrosarcomes, ce fait resterait cependant très rare.

 

Quels en sont les symptômes ?

 

Un fibrosarcome se développe sous la peau. Il se présentera sous la forme d’une masse en surface du corps pouvant apparaitre n’importe où, toutefois on note des localisations préférentielles. Il existe aussi des sarcomes des tissus mous non liés aux sites d’injections pouvant se développer au niveau de la cavité orale, des extrémités des membres, de la tête, etc. De 1996 à 2006 la localisation clinique la plus fréquente des sarcomes des tissus mous était la région inter-scapulaire (39.5 %), venait ensuite le membre postérieur droit (17.1%), le membre antérieur droit (9.5%), puis la hanche droite (7.9%),… Toutefois on remarque que la répartition des sarcomes présent aux sites d’injection s’est modifiée depuis 1990, avec une baisse de la proportion des sarcomes interscapulaire et une augmentation de proportion de sarcomes à certaines autres localisations (antérieur droit, hanche/ région abdominale droite), ce qui est probablement en lien avec les nouvelles recommandations vaccinales (avant nous vaccinions surtout en région interscapulaire).

Ces masses sont généralement dures, infiltrent les structures sous-jacentes (ils peuvent infiltrer les enveloppes des muscles, les muscles, les os) et elles sont mal délimitées. Ces tumeurs sont en effets très invasives localement. Les sarcomes liés aux sites d’injection sont généralement plus agressifs que les sarcomes d’apparition spontanée.

La vitesse de développement d’un sarcome des tissus mous varie selon son agressivité, elle est le plus souvent lente mais des progressions rapides peuvent être observées. Ces masses, si elles ne sont pas traitées pourront s’ulcérer (ce qui donne une impression d’ouverture de la masse) et s’infecter le cas échéant.

En cas de récidive après un retrait chirurgical un fibrosarcome aura tendance à se développer plus rapidement.

Les sarcomes associés aux sites d’injection métastaseraient dans environ 25 % des cas, avec une localisation préférentielle de ces métastases au niveau des poumons. Ces métastases sont plus fréquentes lors de fibrosarcomes de haut grade.

 

Le diagnostic des fibrosarcomes cutanés

 

Suspecter un fibrosarcome

 

La suspicion pourra être émise lorsque qu’une masse cutanée ou sous cutané est détectée sur un chat. Lors de l’examen clinique le vétérinaire s’intéressera à plusieurs critères comme les caractéristiques de la masse (forme, aspect, contour, délimitation) ainsi que sa localisation par rapport aux sites des injections vaccinales précédentes.

Si une masse est suspecte, il ne faut pas attendre pour « voir comment elle évolue ». En effet, plus cette masse est diagnostiquée et traitée tôt plus sa résection chirurgicale (souvent difficile) sera aisée et plus le risque de récidive sera faible.

 

Confirmer le diagnostic d’un fibrosarcome

 

En premier lieu on pourra réaliser des cytoponction à l’aiguille fine et soumette le prélèvement à une analyse cytologique. Cette analyse cytologique pourra apporter un diagnostic définitif ou non. Elle permettra en outre, d’écarter d’autres hypothèses (abcès, kyste, hématome, granulome, autres tumeurs, etc.) ou de conclure au diagnostic lors de l’observation de fibroblastes tumoraux.

Si la cytologie n’apporte pas de diagnostic définitif et qu’un doute persiste, alors, votre vétérinaire vous proposera de réaliser des biospies incisionelles et de réaliser une analyse histologique pour obtenir le diagnostic. Il faut absolument identifier un fibrosarcome car les marges prévues lors de l’exérèse de la tumeur doivent être très larges. Si on retire un fibrosarcome de façon trop limitée, on s’exposera à des récidives locales (toutes les cellules tumorales n’auront pas été enlevées). Cette biopsie incisionnelle pourra être effectuée sous anesthésie locale.

 

Déterminer le stade clinique du fibrosarcome

 

Si les métastases sont peu fréquentes dans le cadre des fibrosarcomes il ne faut pas pour autant négliger le bilan d’extension.  En parallèle, de ce bilan d’extension on réalisera des analyses sanguines pour évaluer l’état de santé du patient (dosage des hormones thyroïdiennes, réalisation d’analyses biochimiques sanguines, etc.)

On s’intéressera notamment à l’extension locale du fibrosarcome (voir déterminer l’extension d’une tumeur). En effet, ces tumeurs sont très agressives localement et sont mal délimitées, il est donc nécessaire de savoir jusqu’où la tumeur s’étend localement et quelles structures a-t-elle pu atteindre (muscles, os, etc.). L’examen complémentaire de choix sera le scanner corps entier, qui  permettra en parallèle du bilan d’extension local, de rechercher des métastases, notamment des métastases pulmonaires.  Le scanner permettra de planifier la chirurgie de retrait et les marges à réaliser. En effet, si l’on se contente de la palpation, il en résultera une sous-estimation de la quantité nécessaire de tissus à retirer pour éradiquer toutes les cellules tumorales.

Une analyse histologique suivra le traitement chirurgical et permettra d’évaluer les marges (voir les marges chirurgicales) et de déterminer le grade de la tumeur. Les marges seront qualifiées de saines ou d’infiltrées selon que l’on observe ou non des cellules tumorales aux limites du prélèvement. La détection des cellules tumorales périphériques peut se révéler compliquée pour le pathologiste.

Si le scanner n’est pas réalisable, des radiographies thoraciques pourront être réalisées mais elles sont moins précises pour détecter les métastases.

Si des nœuds lymphatiques apparaissent anormaux à votre vétérinaire (changement dans leur consistance, leur taille, leur mobilité, etc.), ils seront cytoponctionnés pour rechercher des cellules tumorales au moyen d’une analyse cytologique.

Le stade clinique découlera des résultats de ces examens. Ces stades s’appuient sur divers critères comme la profondeur des tissus atteints, la taille de la tumeur, l’infiltration ou non des nœuds lymphatiques par des cellules tumorales, la présence de métastases à distance de la tumeur.

 

Le pronostic des fibrosarcomes

 

Le pronostic sera extrêmement dépendant du contrôle local que l’on obtiendra sur ces tumeurs, en effet ces tumeurs récidivent fréquemment. Les tumeurs de petites tailles, la présence de marges saines après résection chirurgicale, la prise en charge par un chirurgien spécialisé sont des facteurs de meilleur pronostic. Il existe également des facteurs péjoratifs comme un grade élevé.

Le traitement

Le traitement fera dans l’idéal appel à une ou plusieurs des stratégies thérapeutiques présentées ci-dessous.

 

La chirurgie

La chirurgie reste le traitement de première ligne lorsque la tumeur est retirable. Aujourd’hui certaines études recommandent de retirer 5 cm de tissu autour de la tumeur et deux fascias musculaires en profondeur.

Le respect de ces marges très larges peut s’avérer compliqué lorsque ces tumeurs sont mal localisées ou qu’elles sont trop volumineuses.

Le retrait incomplet de ces tumeurs est la cause majoritaire de récidives.

Ce retrait doit être effectué par un vétérinaire spécialisé en chirurgie oncologique.

Une analyse histologique suivra le traitement chirurgical et permettra d’évaluer les marges (voir les marges chirurgicales) et de déterminer le grade de la tumeur.

 

La radiothérapie 

La radiothérapie doit être considérée pour tous les fibrosarcomes après retrait chirurgical.

En effet, les fibrosarcomes récidivent fréquemment et la radiothérapie associée à la chirurgie permet un meilleur contrôle des récidives locales.

La radiothérapie peut s’effectuer en préopératoire (radiothérapie néoadjuvante) ou en postopératoire (radiothérapie adjuvante). Elle doit, dans ce dernier cas, être commencée entre 10 et 14 jours après la chirurgie pour en tirer les meilleurs bénéfices.

 

La chimiothérapie 

Certains auteurs recommandent son utilisation lors de fibrosarcomes de haut grade afin de contrôler une diffusion métastatique.

Elle sera alors réalisée en association avec la chirurgie et la radiothérapie.

Elle peut être également utilisée seule dans le cas où la chirurgie et la radiothérapie ne sont pas une option choisie.

 

Les autres thérapies

L’immunothérapie :

Une des techniques appartenant à l’immunothérapie consiste à introduire un virus dit recombinant (modifié par génie génétique et donc non pathogène) qui va permettre la production d’interleukine II  (molécule médiatrice de l’immunité) qui stimulera le système immunitaire. Elle pourra par exemple être utilisée en compléments d’une radiothérapie interstitielle et d’une chirurgie. Elle a pour but de stimuler le système immunitaire en périphérie de la tumeur en espérant ainsi une action de ce dernier contre les cellules tumorales. Une étude a montré une association intéressante de l’immunothérapie avec la chirurgie et de la radiothérapie interstitielle (utilisant des billes d’iridium) notamment pour ce qui est de la prévention des récidives locales des fibrosarcomes.

 

Electrochimiothérapie :

Cette technique utilise un courant électrique pour accentuer la perméabilité des cellules aux molécules de chimiothérapie tel que la Bléomycine ou la Cisplatine. Elle permettrait de mieux contrôler les récidives locales.