Suspecter un cancer

Suspecter un processus tumoral

Les caractéristiques de votre animal

 

L’âge de votre animal
La race de votre animal
Le sexe de votre animal
Autres caractéristiques

Les symptômes cliniques

 

La présence d’une masse ou d’autres manifestations cutanées
Des anomalies qui ne se voient pas mais qui se sentent
Les défauts de symétrie
Altération de l’état général
Des symptômes plus spécifiques

 

 

En cancérologie, la rapidité d’établissement d’un diagnostic précis peut s’avérer vitale. La première étape du diagnostic c’est de suspecter la tumeur ! Cette précocité de suspicion est donc primordiale pour accélérer le diagnostic puis le traitement.

Face à certains signes cliniques, un processus tumoral peut être l’hypothèse diagnostique principale émise par votre vétérinaire ; mais il peut aussi s’agir d’une hypothèse parmi beaucoup d’autres, ne vous inquiétez pas trop vite !

Cette suspicion clinique sera amenée à être renforcée ou diminuée selon les résultats des examens complémentaires permettant d’explorer les causes de ces symptômes. Dans d’autres situations, une tumeur peut être découverte de manière fortuite suite à des examens complémentaires réalisés pour des  raisons différentes.

Dans cette première partie nous vous proposons de découvrir les éléments qui peuvent nous mettre la puce à l’oreille !

Lorsque vous présenterez votre animal en consultation, les hypothèses diagnostiques seront formulées en fonction des symptômes que présentera votre animal mais elles dépendront aussi  de ses propres caractéristiques.

 

Les caractéristiques de votre animal

 

Selon ses caractéristiques individuelles, votre animal peut présenter plus de risques de développer un cancer. On parlera alors de  facteurs favorisants  ou de  facteurs de risques. Lorsqu’ils sont présents, ces facteurs augmentent le risque pour votre animal de développer un cancer par rapport à la moyenne de l’ensemble de la population de chiens ou de chats.

Ce sont des facteurs favorisants mais non suffisants pour développer un cancer :

«Mon boxer à plus de risques de développer un mastocytome qu’un autre chien. »

=> Affirmation EXACTE

«Tous les boxers développent un mastocytome. » => Affirmation FAUSSE

«Si mon chien n’est pas un boxer, il n’aura jamais de mastocytome. » => Affirmation FAUSSE

 

L’âge de votre animal

 

Si être vieux ne veut pas dire que l’on va avec certitude développer un cancer, le nombre de tumeurs déclaré au sein d’une population animale vieillissante est en revanche globalement augmenté. Si cette généralité est ancrée dans les esprits, on note aussi des exceptions à la règle :

Par exemple : Une étude réalisée en Suisse parue en 2016 portant sur 121 963 chiens montrait que la proportion de chiens développant des tumeurs comme des adénocarcinomes, des tumeurs mélanocytaires ou des carcinomes épidermoïdes augmentait progressivement avec l’âge. Pour certaines tumeurs comme les mastocytomes, les hémangiosarcomes ou d’autres, cette corrélation est moins bien respectée : le risque n’augmente pas progressivement avec l’âge mais on observe que le risque global de développer ces cancers augmente brutalement après un certain âge. En effet, dans cette étude, le risque de développer la tumeur en question est par exemple augmenté après 3 ans d’âge pour le mastocytome et 5 ans d’âge pour les hémangiosarcomes. A l’inverse, pour certaines tumeurs, par exemple pour les lymphomes, il semble que le nombre de cancers développés augmente progressivement avec l’âge jusqu’à un certain âge (6 ans) puis diminue par la suite.

Chez le chat, on note la même tendance générale avec une augmentation du risque de développer un cancer en lien avec l’augmentation de l’âge.

 

La race de votre animal

 

On retrouve aussi des prédispositions raciales. En effet, votre animal pourra être plus susceptible de développer un certain type de cancer selon la race à laquelle il appartient.

Voici un tableau non exhaustif présentant des prédispositions tumorales liées à certaines races :

 

Pour les chats, les prédispositions raciales sont moins bien définies. Il semble qu’il faille rester prudent quant aux termes de prédispositions raciales dans l’attente d’études supplémentaires. Toutefois, une étude réalisée en Suisse permet de dégager les tendances suivantes :

  • Les chats siamois et orientaux semblent être plus sujets aux adénocarcinomes (tumeurs mammaires) que le reste de la population féline.
  • Les races Somali et Oriental apparaissent comme plus susceptibles de développer un Lymphome.
  • Au niveau des tumeurs gastro-intestinales, les races semblant plus à risque sont la race siamoise, la race Somali ainsi que la race Chartreux.
  • On notera aussi une prédisposition des chats Siamois aux lymphomes médiastinaux.

La race de votre animal peut donc être un indicateur supplémentaire pour la suspicion d’un processus tumoral.

 

Le sexe de votre animal

 

On considèrera non seulement le sexe de votre animal mais aussi si, il ou elle, a été stérilisé(e) et à quel moment de sa vie. Certaines tumeurs sont par exemple beaucoup plus fréquentes chez les femelles comme les tumeurs mammaires et les adénocarcinomes des glandes apocrines des sacs anaux. L’âge auquel la stérilisation a été réalisée est également important. En effet, l’apparition de certaines tumeurs peut dépendre de l’imprégnation hormonale comme c’est le cas pour les tumeurs mammaires (voir les tumeurs mammaires chez le chat). Autre exemple, un chien mâle non castré sera plus à même de développer un circumanalome qu’un chien mâle stérilisé.

 

Autres caractéristiques

 

De nombreuses autres caractéristiques peuvent être considérées si elles sont pertinentes dans une situation donnée, par exemple :

  • Le statut FeLV : pour un chat donné on cherchera à savoir si il est porteur du virus FeLV, encore appelé virus de la Leucose Féline, ce qui implique de savoir si ce chat est vacciné, ou bien, s’il a déjà été dépisté pour ce virus dans le cas où ses conditions de vie le prédispose à cette infection virale. En effet, ce virus est un facteur favorisant voire suffisant à l’apparition de lymphome, notamment d’un lymphome médiastinal (voir les lymphomes chez le chat). La présence de ce virus impacte le pronostic.
  • Le statut vaccinal : un chat vacciné régulièrement sera plus sujet au développement de fibrosarcomes localisés aux sites d’injections (voir les fibrosarcomes sous-cutanés chez chat).
  • La couleur de la robe : on retrouve par exemple le cas particulier des chats blancs prédisposés à développer des carcinomes épidermoïdes au niveau de leurs oreilles.

Les symptômes cliniques

 

La présence d’une masse ou d’autres manifestations cutanées

 

Classiquement, lorsque l’on pense à une tumeur, on imagine une masse. Cette forme de manifestation des tumeurs reste fréquente mais ne doit pas faire l’objet d’une psychose : toutes les masses ne sont pas des tumeurs ! En effet, les abcès, les kystes, les hyperplasies, les granulomes inflammatoires, les hématomes sont également des lésions fréquentes qu’il faudra différencier des tumeurs. Si les masses sont des formes par lesquelles se manifestent fréquemment les tumeurs, on peut à l’inverse observer des pertes de structure avec, par exemple, l’apparition d’ulcères  comme dans le cas des carcinomes épidermoïdes se développant sur les oreilles. La peau pourra aussi être envahie diffusément par des cellules tumorales. L’infiltration par des cellules tumorales apparaitra alors sous forme de plaques épaissies et mal délimitées.

Lors de l’apparition d’une masse, il est plus prudent pour votre animal que vous consultiez dès l’apparition de cette masse, afin que le vétérinaire investigue et identifie cette masse. Une masse qui apparait et qui est toujours présente quelques jours plus tard, une masse qui vous semble être de grosse taille ou une masse qui grossit rapidement nécessite absolument une consultation chez votre vétérinaire traitant.

Si certaines masses sont visibles facilement, ce n’est en revanche pas le cas de toutes les masses, et encore moins, de tous les « nodules », plus petits. En revanche, on peut souvent les sentir par palpation.

Il est donc important de caresser votre animal, de le regarder de près car cela peut permettre de détecter une tumeur plus précocement et ainsi de la prendre en charge le plus tôt possible avant que son évolution ne soit préjudiciable pour la vie de votre animal.

Ainsi en tant que propriétaire, vous avez un rôle clef dans la précocité de détection des masses tumorales. Manipulez votre animal, caressez-le, il sera ainsi d’autant plus facile à examiner et à soigner le cas échéant.

 

Des anomalies qui ne se voient pas mais qui se sentent

 

Certaines masses localisées profondément comme au niveau des organes abdominaux ne se voient pas forcément mais peuvent, si elles sont suffisamment volumineuses, se sentir par une palpation abdominale. On pourra aussi sentir lors d’infiltration diffuse des cellules tumorales dans les organes une augmentation de taille de ces organes (par exemple, une augmentation de la taille du foie ou un épaississement des anses digestives).

 

Les défauts de symétrie

 

Comme nous, un chien ou un chat est plus ou moins symétrique. Toutefois, avec le développement d’une tumeur, on peut observer des déformations et donc une asymétrie. Par exemple, dans le cadre de tumeur des cavités nasales (exemple : les carcinomes des cavités nasales chez le chien) on peut parfois observer une asymétrie du chanfrein, avec un bombement d’un côté. Autre exemple, pour un chien mâle entier, il arrive d’observer un testicule de taille augmentée par rapport au second ce qui traduit le plus souvent soit une inflammation du testicule soit une tumeur testiculaire. Il est aussi possible d’observer une déformation des membres dans le cas de tumeurs osseuses…

 

Altération de l’état général

 

Comme présenté dans la partie intitulée « bases de biologie et de cancérologie », les syndromes paranéoplasiques peuvent être responsables d’altération de l’état général (voir les syndromes paranéoplasiques). L’un de ces syndromes le plus fréquent est un amaigrissement. On effet, on peut observer une perte musculaire et/ou graisseuse importante allant même jusqu’à la cachexie. Cet amaigrissement peut par ailleurs être très rapide et être indépendant de l’appétit ou de la quantité d’aliments qu’ingère l’animal. Parmi les autres syndromes paranéoplasiques, on peut aussi retrouver une perte d’appétit voire de l’anorexie ou encore de l’hyperthermie (c’est-à-dire une température supérieure à 39,2 °C » fièvre).

Ces symptômes sont très peu spécifiques car de nombreuses maladies peuvent entrainer un amaigrissement, de l’hyperthermie ou de l’anorexie. Pour en comprendre l’origine il faudra donc le plus souvent réaliser des examens complémentaires (analyses sanguines et urinaire, échographie, etc.).

Votre animal peut aussi le cas échéant présenter de l’abattement, de la fatigue, une prostration mais, là encore, ce sont des signes généraux non spécifiques d’une pathologie tumorale.

Des symptômes plus spécifiques

 

Tous les organes peuvent-être le siège d’un cancer ; il en résulte une grande diversité de symptômes possibles. Les symptômes observés dépendront de nombreux critères, tels que la nature de la tumeur, sa localisation, son stade clinique, etc. Par exemple un lymphome localisé au niveau des vertèbres pourra entrainer une compression de la moelle épinière et donc des troubles nerveux comme de l’ataxie, de la parésie. Mais si ce lymphome est localisé dans le tube digestif, il entrainera plutôt des troubles digestifs (vomissements, diarrhée). Un ostéosarcome pourra entrainer une très forte boiterie ainsi qu’une douleur très intense lorsque l’on touche le membre atteint.

Ajouté à cela, des syndromes paranéoplasiques spécifiques pourront encore diversifier le tableau clinique, ces derniers peuvent, par ailleurs, faciliter un diagnostic précoce. Par exemple un lymphome peut s’accompagner d’un syndrome d’hypercalcémie maligne. Ce syndrome d’hypercalcémie signifie qu’il y a trop de calcium dans le sang, ce qui entrainera une augmentation de la fréquence et de la quantité d’émission d’urine ainsi qu’une augmentation de la prise de boisson. On désigne l’ensemble sous le terme de polyuro-polydipsie (voir syndrome d’hypercalcémie maligne). Cette hypercalcémie pourra donc être mise en évidence à la suite d’une analyse sanguine et orienter le diagnostic sur les causes possibles de l’hypercalcémie parmi lesquelles on retrouve certains processus tumoraux.

 

Récapitulatif :

Lorsque votre animal présente une altération de l’état général, ou une masse que vous avez pu repérer, n’attendez pas pour décider de consulter votre vétérinaire.

L’ensemble des signes cliniques de votre animal associés aux données épidémiologiques (âge, race, couleur du poil, etc.) vont permettre de suspecter un processus tumoral. Toutefois ce sera une hypothèse parmi d’autres.

Des examens complémentaires vous seront proposés par votre vétérinaire selon les suspicions qu’il aura, afin de confirmer ou d’infirmer ces hypothèses diagnostiques. Ainsi divers examens pourront vous être proposés : un numération formule sanguine, un frottis sanguin, une analyse biochimique sanguine, une échographie, des radiographies, des analyses urinaires, une endoscopie,  un myélogramme, un examen IRM, un scanner, etc.

Si votre vétérinaire détecte ce qui pourrait correspondre à une tumeur, il faudra alors confirmer le diagnostic par des examens morphologiques (cytologieet/ou histologie) puis réaliser déterminer l’extension de la tumeur.

 

 

Consulter la section suivante ==> Confirmer le diagnostic et caractériser précisément la tumeur.